C’était du temps où l’eau courante n’existait pas, du temps où pour prendre le bain il fallait remplir la baignoire d’eau chauffée sur le poêle.
Et justement, aujourd’hui, c’était le jour où le Père Soreille prenait son bain. Comme toujours, une des soeurs de la communauté lui avait préparé l’eau chaude et les serviettes. Pour cette fois, c’était Soeur Marie, une toute nouvelle qui devait aider le Père dans ses ablutions.
La mère supérieure avait prévenu soeur Marie : Autant que faire se peut, il ne faut pas regarder le Père Soreille lorsqu’il est tout nu, et aussi, il faut faire ce que demande le Père Soreille et prier…
Le lendemain matin, la Mère supérieure croise la jeune soeur Marie sous le préau du couvent, et elle lui demande comment s’est passé le bain du Père Soreille. La jeune novice répond béatement :
– Oh ma Soeur, merveilleusement bien: j’ai obtenu le salut de mon âme !
– Le salut ?! Comment cela ?
– Eh bien, pendant que le Père Soreille se baignait, il m’a demandé de le laver. Puis pendant que je le lavais, il a guidé ma main entre ses deux jambes, là où, a-t-il dit, le Seigneur garde les Clés du Paradis…
– Vraiment, répond la Mère supérieur incrédule
Et Soeur Marie continue :
– Puis le Père Soreille a dit que si la clé du Paradis ouvrait ma serrure à moi, alors la porte du Paradis me serait ouverte à jamais, et je serai assurée du salut et de la paix éternelle… Et à ce moment là, le Père Soreille a introduit sa clé du Paradis dans ma serrure.
– Ah oui ? Relance la Mère Supérieure un peu agacée.
– Oui. D’abord, ça fait très très mal, mais le Père Soreille m’a dit que le chemin du Salut était souvent pénible, mais que la Gloire de Dieu remplirai bientôt mon coeur d’extase. Et c’est ce qui s’est passé effectivement. Ça a été l’extase tout de suite après. C’est pour ça que je dis que j’ai obtenu le salut de mon âme.
Alors la vieille soupire :
– Ha, quel menteur et pervers avec ça… Il m’a dit à moi que c’était la Trompette de l’Archange Gabriel, et j’ai soufflé dedans pendant 40 ans !